Perturbations harmoniques

Définitions
Signature d’une perturbation harmonique

Les harmoniques sont des signaux de fréquence multiple de la fréquence industrielle. Ils sont générés par des charges dites non-linéaires. Certains appareils ne présentent pas une impédance constante durant la durée de l’alternance de la sinusoïde de tension à 50 Hz. Ils absorbent alors un courant non sinusoïdal qui se propage dans le réseau et déforme ainsi l’allure de la tension. Une tension ou un courant déformé par rapport à la sinusoïde de référence peut être décomposé en une somme de signaux sinusoïdaux de fréquences multiples à celle du fondamental (50 Hz pour le réseau de distribution).

Chaque composante est caractérisée par son rang (par exemple rang 5 pour une composante à la fréquence de 250 Hz, soit 5 x 50 Hz) et par son amplitude exprimée en pourcentage par rapport à celle du fondamental.

On caractérise la pollution d’un réseau de manière globale par le taux de distorsion harmonique en tension ou en courant.

C’est le rapport, exprimé en pourcent, entre la valeur efficace des composantes harmoniques et l’amplitude du fondamental.

Rang des harmoniques
Decomposition des rangs harmoniques

Dans le cadre de la décomposition en série de Fourier d‘un signal (Termes généraux : Un signal est un message simplifié et généralement codé. Il existe sous forme) périodique, un courant électrique (Un courant électrique est un déplacement d‘ensemble de porteurs de charge électrique (électrons).) est décomposé en un signal sinusoïdal (Un signal sinusoïdal est un signal (onde) dont l’amplitude, observée à un endroit précis, est une fonction) à la fréquence du réseau, et la somme (en général infinie) de signaux sinusoïdaux, de fréquence 2, 3, 4, 5, ..n fois la fréquence du réseau. C‘est ce nombre (Un nombre est un concept caractérisant une unité, une collection d‘unités ou une fraction d‘unité.) n qu‘on appelle le rang de la composante harmonique (Dans plusieurs domaines, une harmonique est un élément constitutif d‘un phénomène périodique ou vibratoire (par exemple).

Cas particulier de l‘harmonique de rang 2 : En général les charges du réseau sont symétriques. Dans ces conditions les harmoniques de rang 2 sont censés être nulles.

Cas particulier de l‘harmonique de rang 3  : C‘est le cas le plus fréquent. Il est généré entre autre par les ordinateurs, les téléviseurs ou autres équipements électroniques. Ils sont particulièrement néfastes pour les réseaux électriques triphasés en raison des courants de neutre importants alors produits. Il en va de même pour les harmoniques impairs du troisième rang (9e, 15e, 21e, etc.) aussi connus sous l‘appellation
« harmoniques séquence zéro ».

Générateurs d’harmoniques

On considérait souvent abusivement que les générateurs d‘harmoniques étaient essentiellement industriels. Or des mesures sur le réseau électrique ont montré que le moment où le réseau est le plus pollué par les harmoniques est le dimanche soir, c’est-à-dire à un instant où les industries tournent au ralenti, mais où les téléviseurs sont massivement allumés !

Les ordinateurs sont les principaux émetteurs d‘harmoniques. En effet, ces appareils comportent des filtres capacitifs composés de diodes, bobines et condensateurs qui perturbent la tension du réseau. Le rôle de ces filtres est de transformer une tension alternative délivrée par le réseau en une tension continue. Étant donné le nombre de ces équipements dans un Data Center et leur longue période d‘utilisation dans une journée, ces appareils émettent un courant et une tension harmonique qui va perturber la tension sinusoïdale du réseau, même s‘ils ne consomment pas une puissance importante.

Courant alternatif en amont d‘un redresseur en pont de Graetz suivi d‘un condensateur

Courant alternatif en amont d‘un redresseur en pont de Graetz débitant un courant continu parfait sur charge très inductive.

L’éclairage, par lampes à décharge et tubes fluorescents, est générateur de courants harmoniques. Le taux individuel d’harmonique 3 peut même dépasser 100 % pour certaines lampes fluo-compactes modernes, d’où une attention particulière à porter à la détermination de la section et de la protection du conducteur neutre qui, véhiculant la somme des courants d’harmoniques 3 des trois phases, risque un échauffement important.

Autres générateurs d’harmoniques :

  • Machines tournantes
  • Four à Arc
Effets instantanés
  • Dégradation du facteur de puissance
  • Réduction de la puissance des moteurs (couple négatif)
  • Surcharges des câbles, transformateurs et moteurs
  • Augmentation du bruit dans les moteurs
  • Erreur d’enregistrement dans les compteurs
  • Surdimensionnement des câbles
  • Réduction de la capacité du réseau
  • Mauvais fonctionnement des contacteurs
  • Perturbation des systèmes électroniques
Effets à long terme
  • Réduction de la durée de vie des moteurs
  • Détérioration des batteries de condensateurs
  • Réduction de la durée de vie des transformateurs
  • Vieillissement accéléré des isolants et des diélectriques
  • Pertes Fer (Iron losses), pertes crées par le champ magnétique +
    pertes dues aux courants de Foucault, entrainant un déclassement des transformateurs et des moteurs

Aspects Normatifs

On définit le concept de THD (Total Harmonic Distorsion). Dans certains pays, le fournisseur d‘énergie électrique s‘engage sur la pureté de l‘alimentation électrique fournie à ses clients industriels, via un niveau de THD garanti (typiquement 2 %).

La norme IEC61000 fixe les niveaux de perturbations harmoniques jusqu’au 25ème rang

Plusieurs normes existent pour cadrer ce sujet et parmi les plus importantes :

  • CEI 61000-1-1 : Pour définir les harmoniques.
  • CEI 61000-2-1 à 5 : Pour les réseaux basse fréquence et transmission.
  • CEI 61000-3-2 à 6 : Pour les limites d‘émission de courant harmonique.
  • CEI 61000-4-1 à 15 : Pour les essais et les immunisations des matériels.
Solutions

Des solutions de dépollution harmonique existent :

  • Le filtrage passif qui consiste à installer un circuit L, C série, accordé sur la fréquence de la composante à éliminer ; C‘est la solution la plus simple et la moins chère d‘entre toutes, mais également la moins performante. Comme son nom l‘indique, elle utilise des éléments purement passifs pour tenter d‘améliorer la signature du courant. Cette solution dite « passe-bande » est composée d’un condensateur en parallèle d’une bobine. Cet assemblage est normalement calculé pour atténuer la 3e harmonique entre autre, la plus intense après le fondamental.

 

  • Le filtrage actif génère des composantes harmoniques aux mêmes fréquences et en opposition de phase aux perturbations mesurées ; Cette solution adapte donc un filtrage de manière instantanée, en fonction du type et du taux de perturbation présent sur le réseau analysé offrant une solution optimale en terme de rendement et d’efficacité/coût.

 

 

  • Le filtrage hybride combine les solutions passive et active ;
    Cette solution, la plus coûteuse mais également la plus efficace, a pour avantage de combiner les deux principales solutions de filtrage et de répondre à tous les niveaux de perturbations harmoniques.

 

  • Concevoir une bonne architecture réseau.

    En effet, une bonne architecture réseau, basées sur la séparation des charges dites polluantes des matériels dit sensibles permets d’agir efficacement.


    Quand on est en présence d’un pollueur de forte puissance, il est souhaitable de l’alimenter par un autre transformateur
    MT/BT.

Conclusion

Tous les consommateurs définis précédemment produisent une pollution électrique harmonique et nécessitent généralement une compensation de l’énergie réactive qu’ils consomment, d’où l’installation de condensateurs de compensation.

Ces condensateurs, s‘ils sont installés sans précaution, peuvent entrer en résonance avec les inductances du réseau et amplifier les perturbations harmoniques, c’est pourquoi il est important et conseillé de procéder à une analyse du réseau afin de déterminer la solution la plus adaptée.

La bonne conception d’une architecture et la mise en place d’une solution de compensation/filtrage adaptée permettent d’optimiser efficacement le rendement d’un réseau de distribution avec pour résultat un retour sur investissement relativement court, 3 à 5 ans en fonction de la charge et du niveau de perturbation.

Références :
IEC 61000, cahiers techniques Schneider Électrique

Texte rédigé par

Michael Margot
Ingénieur Master II
michael.margot@energyence.ch