Chacun connaît de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) à vocation humanitaire telles que Swissaid, Terre des hommes, Médecins sans frontières, etc. Mais qui a entendu parler d’Électriciens sans frontières ? Et pourtant, cette association intervient dans un domaine qui constitue le coeur de notre métier…
Active depuis 1986, Électriciens sans frontières est une ONG française dont le siège est situé en Île-de-France. Son credo : faire de l’accès à l’électricité et à l’eau un facteur de développement humain et économique des populations
les plus démunies. Pour atteindre cet objectif, elle dispose actuellement de plus de 1300 bénévoles répartis dans toute la France.
Récemment, Électriciens sans frontières a élargi ses structures en créant des antennes en Allemagne, en Italie, en Espagne et aux États-Unis. Le but de cet article consiste à présenter les activités de cette ONG afin de motiver des résidents suisses (actifs professionnellement ou déjà retraités) à y adhérer dans la perspective de la création d’une antenne en Suisse.
L’électricité peut sauver des vies par millions
Selon la Banque mondiale [1], 1,1 milliard de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à l’électricité. La majorité d’entre elles vivent en Asie et en Afrique subsaharienne, dont 80 % en milieu rural. Selon la même source, plus de 3 milliards de personnes sont encore dépendantes de sources d’énergie traditionnelles telles que les bougies, les lampes à pétrole, le bois, etc. Or, ces énergies sont souvent nocives et nuisent à la santé.
Finalement, toujours selon la Banque mondiale, 2,4 milliards de personnes n’ont pas accès à un assainissement d’eau adéquat et 663 millions de personnes vivent sans disposer d’une
source d’eau de qualité. De ce fait, plus de 3,4 millions de personnes meurent chaque année de maladies liées à l’eau, du manque d’assainissement des eaux usées ou en raison d’une hygiène insuffisante.
Ces chiffres ne peuvent laisser indifférent.
L’électricité revêt une importance majeure dans la vie de tous les jours. Elle contribue à améliorer l’accès à la nourriture, à l’eau, à l’éducation, aux soins, et elle est également essentielle pour faire face aux enjeux sociaux,
économiques ou environnementaux. Aider les personnes les plus pauvres passe donc (aussi) par l’étape de la mise à disposition d’électricité.
De la proposition de projet au transfert des compétences
Mais comment se déroule exactement un projet d’Électriciens sans frontières ?
L’ONG a à coeur de répondre à des besoins exprimés localement et agit prioritairement dans les régions rurales à l’écart des réseaux électriques nationaux. Elle privilégie les projets axés sur des structures collectives (écoles,
centres de formation, de santé, lieux publics, etc.) afin que chacun puisse en profiter. Elle évite par la même occasion de créer un clivage social. Dans un premier temps, les propositions de projets émanant d’une autre association ou d’une collectivité territoriale sont soumises à une commission qui les étudie et détermine lesquels d’entre eux sont éligibles. Dès qu’un projet est déclaré comme tel, commence la phase de la recherche du financement. Une fois les fonds nécessaires réunis, le projet est définitivement accepté.
Électriciens sans frontières utilise des énergies renouvelables dans 95 % de ses projets, d’une part pour des raisons économiques à long terme et, d’autre part, afin de réduire l’impact environnemental des sites de production de courant. Pour les mêmes raisons, elle accorde également une importance toute particulière à leur efficacité énergétique.
Finalement, l’ONG prend soin d’impliquer la population lors de la réalisation de ses projets. Le fait de construire les installations et d’en effectuer la maintenance en collaboration avec les acteurs locaux permet d’assurer la formation de ces derniers, de procéder au transfert des compétences et de favoriser la pérennité des projets. De plus, Électriciens sans frontières développe sur place des activités économiques qui permettront, à l’avenir, de financer l’entretien et la maintenance des équipements.
Des projets durables
L’objectif d’Électriciens sans frontières consiste à réaliser des projets durables avec un engagement sur dix ans. Pour ce faire, en plus d’un recours aussi étendu que possible à des énergies renouvelables, l’association prévoit systématiquement un suivi des projets et dispose pour chacun d’eux de fonds dédiés à leur pérennisation. Ainsi, une fois les installations mises en service, des ressources financières sont prévues pour pouvoir éventuellement les remettre en état, après une analyse spécifique de chaque situation.
Des projets de développement, mais pas seulement
Électriciens sans frontières, c’est 75 % de projets de développement, soit des projets privilégiant des avancées sociales et économiques grâce à l’accès à l’électricité. Il peut s’agir là, par exemple, d’électrifier un centre de santé et un dispensaire dans le village de Voka au Congo-Brazzaville (85 000 bénéficiaires), d’électrifier six écoles dans le « comité de développement villageois » de Tapting au Népal (1100 élèves), ou encore de mettre en place un pompage solaire, un château d’eau et des latrines dans le village de Dzogbépimé au Togo.
Ces installations permettent de puiser de l’eau claire en profondeur et ainsi de réduire le risque de maladies hydriques tout en subvenant aux besoins en eau des 3500 habitants, de l’école et du dispensaire.
Mais Électriciens sans frontières c’est aussi 5 % d’interventions en cas d’urgence. En effet, l’ONG apporte son soutien aux populations sinistrées et aux autres ONG urgentistes lors de catastrophes humanitaires. Elle est ainsi intervenue aux Philippines, dévastées par des typhons en 2013 et en 2015, en Haïti, ravagée par un séisme en 2010 et par l’ouragan Matthew en 2016, au Népal en 2015, aux Antilles en 2017, etc. Finalement, 20 % des projets peuvent être considérés comme des projets d’expertise et d’encadrement. Il s’agit de mettre à disposition les compétences des membres d’Électriciens sans frontières en matière d’accès à l’électricité et à l’eau au service des autres acteurs de la solidarité internationale tels que la Croix-Rouge, Médecins du monde, Solidarités International ou Médecins sans frontières.
Bref, les bénévoles d’Électriciens sans frontières ne chôment pas. Rien qu’en 2017, l’ONG est intervenue dans 35 pays, principalement en Afrique et en Asie, pour y réaliser 124 projets. Question financement, en 2017, elle a bénéficié de fonds à hauteur de 2,8 millions d’euros, mais surtout de contributions en nature, sous forme de matériel d’une valeur de 7 millions d’euros.
Pourquoi une antenne en Suisse romande ?
Adhérent d’Électriciens sans frontières depuis 2014, l’auteur de cet article a découvert l’ONG par hasard lors du Salon des métiers de l’humanitaire du Grand Genève à Annemasse.
Depuis lors, il a participé avec enthousiasme à des missions humanitaires bénévoles en Tanzanie, au Vietnam et au Cameroun.
Persuadé que, comme lui, de nombreux professionnels souhaiteraient oeuvrer bénévolement dans un but humanitaire, soit parallèlement à leur activité professionnelle, soit lors de leur retraite, l’auteur aimerait créer, dans un premier temps, une antenne romande d’Électriciens sans frontières. Cela permettrait, d’une part, d’obtenir le support de collectivités publiques et d’entreprises suisses pour la mise en oeuvre de projets humanitaires et, d’autre part, de réunir les participants aux projets dans un cadre régional.
Pour ce faire, l’auteur recherche des professionnels prêts à oeuvrer à la création de cette antenne ainsi que des entreprises susceptibles d’apporter leur soutien, par exemple en mettant occasionnellement à disposition une salle de réunion pour les séances des membres.
C’est avec plaisir que l’auteur se tient à votre disposition pour de plus amples informations et se réjouit de noter votre intérêt à une éventuelle adhésion à l’antenne suisse d’Électriciens sans frontières.
Text rédigé par
Gilbert Suter
Ingénieur-électricien HES, retraité
gilbert.suter@ilansys.com
pour le Bulletin SEV / AES où
il a été publié dans l‘édition 9/2018